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Musique savante et génération X

Les Vox Luminis et Lionel Meunier (troisième en partant de la droite)

PORTRAIT – Auscultée par la sociologie et le marketing, la génération X intrigue. Que se passe-t-il quand cette classe d’âge défend la musique savante ? Réponse avec Lionel Meunier, de Vox Luminis, qui se produit à l’Abbaye de Saintes.


Dimanche soir, la prestation du Collegium Vocal Gent a été époustouflante. Une image frappe : face au maestro Herreweghe, chanteurs et musiciens sont tous trentenaires, appartenant à cette génération née dans les années 70 et au tournant de l’année 1980, la fameuse génération X. Cette classe d’âge qui passionne la sociologie, la démographie comme le marketing pourrait-elle également bouleverser la musique savante ?

Coincée entre les baby-boomers tout-puissants et la génération Y s’évadant dans les jeux vidéos, la génération X se résume en quelques mots : chômage, écologie, Europe. Née avec les crises pétrolières, elle a connu la précarité de l’emploi quand ses aînés passaient leur carrière dans une seule entreprise. Elle sait que les ressources énergétiques sont épuisables. Elle a vu chuter le mur de Berlin et son européanisme s’est nourri du programme Erasmus pour les étudiants.
L’ensemble Vox Luminis, en concert ce soir à l’Abbaye aux Dames, en est un exemple frappant. « Nous sommes effectivement et volontairement un ensemble international, réunissant des musiciens d’une même génération, nés autour de 1980 », explique Lionel Meunier, un Français parti étudier la musique en Belgique. Nourri au sein du Chœur mondial des jeunes, réunissant des voix de 17 à 26 ans, il a voulu retrouver cette même énergie pour son ensemble dédié à la musique baroque et Renaissance.
Première génération à ne pas devoir se battre, la génération X est celle de l’après Guerre froide et de l’espoir d’un monde apaisé. « Vox Luminis évoque une idée de son et de couleur que j’avais en moi et que je voulais obtenir pour le Stabat Mater de Scarlatti, se souvient Lionel Meunier. Un son très plein et lumineux, tiré vers le haut et basé sur la justesse harmonique. Un son qui pétille », à l’image oserait-on dire des fraises Tagada et de la télévision de Dorothée des années 1980 !
L’esprit qui anime les Vox Luminis fait écho aux descriptions sociologiques de la position de la génération X face au travail. Confronté à la précarité, ces jeunes-là ont refusé de fonder leur bonheur sur l’argent, le statut et l’ascension sociale. « Soyons honnêtes : nous sommes moins bien payés que les autres ! Notre récent succès ne nous fait pas oublier que nous avons commencé en bénévoles. Nous savons pourquoi nous sommes là. »
Le rapport à la hiérarchie est également surprenant chez les Vox Luminis qui ont longtemps vécu sans désigner de chef. Lionel Meunier ne se voyait pas lui-même en leader. « Ma taille – 2m05 ! – m’aide à me faire respecter mais je ne prends de décisions qu’après avoir écouté les opinions et intuitions des autres membres, une équipe stable depuis la création de l’ensemble en 2004. Chaque chanteur sait qu’il pourra avoir une influence sur la musique, il est donc très impliqué. Je ne dirige pas, à proprement parler. D’ailleurs, nous travaillons en cercle jusqu’au moment du concert. Et, surtout, nous arrivons à nous autocritiquer sans heurt. Je chante avec eux : il faut bien que quelqu’un me fasse des remarques ! »
Au contraire de la génération Y qui cherche la gloire à la Star Academy, la génération X préfère une gloire des profondeurs (elle a écouté Nirvana…). « Nous sommes des introvertis. Nous voulons montrer que le baroque allemand à ses débuts, souvent jugé austère, n’est pas si introverti que cela. La musique de Samuel Scheidt, Henrich Schütz et Thomas Selle a quelque chose à dire. A nous de la rendre compréhensible… avec cette attention au texte que nous avons hérité d’un certain Philippe Herreweghe ! »
Mercredi 18 juillet 2012, à l’Abbaye aux Dames. Compte-rendu du concert à lire ici.

Article publié dans le journal Sud Ouest, édition de Saintes.

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4 Commentaires

  1. […] L’ensemble Vox Luminis, qu’il est indispensable d’avoir entendu si on aime la musique de cette période, tentera une réconciliation avec nos voisins britanniques en jouant le 20 la musique de Haendel, allemand devenu sujet anglais, et le 18 celle d’Henry Purcell. La partition du Londonien qui sera chantée est tout à fait à propos : l’ode intitulée « Celebrate This Festival ». […]

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