Boulez de B à Z

Boulez-Pierre-29PORTRAIT – Le compositeur français Pierre Boulez s’est éteint le 5 janvier 2016 à Baden-Baden. Une personnalité fascinante qui a marqué durablement la vie musicale française du XXe siècle. A l’occasion de l’exposition que lui consacrait en 2015 la Philharmonie de Paris, j’ai choisi de demander à Benoit Duteurtre quelle était sa vision de Boulez, 20 ans après qu’il ait écrit Requiem pour une avant-garde dans lequel il critiquait les positions de cette figure de proue de l’avant-garde musicale en France.

Le compositeur
Au lendemain de la seconde guerre mondiale, Pierre Boulez veut révolutionner la musique : atonalisme, utilisation de l’informatique et recherche sur l’acoustique. Il se passionne pour l’ethnologie et les instruments et musiques asiatiques. Il s’inspire de la peinture de Jackson Pollock, Paul Klee ou Nicolas de Staël, comme le montre l’exposition de la Philharmonie. Pourtant sa musique est peu connue des mélomanes. « Comparé à ses contemporains, Olivier Messiaen par exemple, il est peu joué dans le monde », constate Benoit Duteurtre. Le directeur de Musique nouvelle en liberté fut l’un des plus vifs critiques de Boulez. « Ses œuvres – Le Marteau sans maître par exemple – demandent souvent des moyens techniques sophistiqués que beaucoup d’orchestres et d’ensembles n’ont pas à leur disposition. Il a relativement peu composé et a souvent retravaillé ses pièces, donnant parfois une sensation d’inachèvement. Son écriture a eu une influence mais elle n’est pas entrée dans les goûts. Sa réputation de compositeur aura été éclipsée par sa popularité de chef d’orchestre. ».

Le chef d’orchestre
C’est pour gagner sa vie que Pierre Boulez prend la baguette notamment dans la compagnie de théâtre de Jean-Louis Barrault et Madeleine Renaud où il est en charge de la musique des spectacles de la troupe. Il y défend la musique de l’avant-garde et l’école de Vienne (Berg, Webern, Schönberg) et Stravinsky. Il devient l’ardent défenseur de la musique française à l’international : « Il a dirigé les œuvres de Debussy et Ravel mieux que quiconque, analyse Benoit Duteurtre. Il a débarrassé ces œuvres de leur sentimentalité romantique pour en donner une version plus moderne, plus objective. De manière globale, on peut dire que Boulez lutte contre la séduction immédiate. Ces enregistrements sont devenus des références ». Anniversaire oblige, les labels Deutsche Grammophon et Erato sortent leur coffret Boulez. Le chef français y dirige les grands orchestres du monde.

Le fondateur d’institutions
L’ensemble intercontemporain et l’Ircam (Institut de recherche sur la musique près du Centre Pompidou), c’est lui. La Cité de la musique ? C’est lui. Et la Philharmonie ? Lui encore. , « Quand on demandait à Jacques Chirac ce qu’il écoutait comme musique, il répondait « Pierre Boulez » ! », raconte Benoit Duteurtre. Difficile de vérifier l’anecdote mais elle montre la place de l’artiste dans la sphère politique. « C’est un homme brillant, un intellectuel, comme la France les aime. Pierre Boulez avait l’oreille des politiques car il était très réputé à l’international comme chef d’orchestre ». La naissance de la Philharmonie de Paris, un de ses rêves les plus chers, donne une idée de son influence.  »

Le difficile héritage
L’école boulézienne a dominé le terrain des années 1950 à 1980. « C’était une école agressive qui dénigrait les musiques de Chostakovitch et de Britten, des oeuvres qui sont entrées au répertoire », poursuit Duteurtre. Cette jeune école sûre d’elle a dû affronter la concurrence d’une nouvelle avant-garde, venue des Etats-Unis. Le mouvement minimaliste – John Adams, Steve Reich et Philip Glass – revient à la tonalité avec une musique « répétitive » plus séduisante. « L’argument des bouléziens, poursuit Duteurtre, était que le public allait s’habituer à leur modernité, mais cela ne s’est pas fait. Leurs musiques se fondent sur des théories mathématiques et architecturales invisibles à la plupart des mélomanes. Il fallait du coup éduquer le public lors de concert-cours du soir. Aujourd’hui des compositeurs sont sortis de cette démarche radicale : des pièces de Philippe Hersant ou Thierry Escaich séduisent plus facilement. »

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couverture_boulez_06.inddA VOIR, A ECOUTER, A LIRE, A CLIQUER
– Se balader dans le webdoc de France Musique qui propose un grand portrait de Pierre Boulez, à travers des photographies inédites, des partitions, des vidéos et des entretiens et l’analyse du musicologue Claude Abromont.
– Lire : Le catalogue de l’exposition est paru aux éditions Actes Sud (ci-contre)

– Exposition à la Philharmonie de Paris,jusqu’au 28 juin, du mardi au vendredi de 12h à 18 h et les samedis et dimanches de 10h à 18h. Regardez la présentation de l’exposition par de notre partenaire, Station Ausone

Une partie de cet article est paru dans Le Parisien du 16 mars 2015.

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