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À l’ombre de Nadia Boulanger

CONCERT – Mikko Franck et l’Orchestre Philharmonique de Radio France ont lancé un cycle de concerts consacrés à Nadia Boulanger (1887-1979), l’une des figures emblématiques et des pédagogues les plus influentes du XXe siècle.

C’est en ne sachant dire que “bonjour” et “au revoir » en Anglais que Nadia Boulanger commença à enseigner la musique au Conservatoire Américain de Fontainebleau, dès sa création en 1921, à la demande du chef d’orchestre Walter Damrosch. Créé à l’initiative du général Pershing à la fin de la Première Guerre mondiale, ce conservatoire avait pour mission d’améliorer le niveau des musiciens américains afin de permettre l’essor de la musique américaine.

Le conservatoire américain de Fontainebleau, dans une aile du château.

Celle que tous appelaient “Mademoiselle” accueillit ainsi dans ses cours presque 600 élèves américains, dont quelques-uns devinrent des compositeurs et pédagogues de renom. Parmi eux, Walter Piston, Aaron Copland et Elliott Carter sont au cœur du programme du premier concert d’un cycle consacré à Nadia Boulanger, tout au long du mois de janvier à la Maison de la Radio. 

Éloge de la pédagogie

Nadia Boulanger elle-même avait pu mesurer pendant sa jeunesse l’importance de profiter de l’enseignement de grands musiciens, ayant été l’élève, entre autres, de Gabriel Fauré au Conservatoire de Paris. Celui qu’elle considérait son “maître” en musique a exercé “une très grande influence” sur ses élèves, “un sens de la dignité, une vision si modeste, si tranquille, si détachée de la vie”, comme elle en témoignait lors de ses entretiens à Bruno Monsaingeon. 

Pour Nadia Boulanger, l’essentiel de son enseignement consistait à transmettre “la connaissance des bases essentielles. C’est-à-dire : entendre, regarder, écouter et voir”. En tant que pédagogue, elle n’essayait pas de faire entrer ses élèves dans un moule, mais elle leur donnait les outils, en matière de composition, d’harmonie et d’analyse musicale, pour qu’ils et elles puissent développer leur propre personnalité musicale. Et comme ont pu l’apprécier les spectatrices et spectateurs de l’auditorium de la Maison de la Radio mercredi 11 janvier, l’enseignement de Nadia Boulanger a favorisé l’émergence de talents très divers. 

Un patchwork d’oeuvres américaines et françaises

C’est avec le très rare “Symphonic Prelude” de Walter Piston (1894-1976) que débute le concert. Ce court prélude orchestral commandé pour servir d’ “ouverture” à la Symphonie n°9 de Beethoven est selon le compositeur “une sorte de conversation autour d’une mélodie exposée par les altos et la clarinette”.  Son écrite néo-classique est une entrée en matière mélancolique, dirigée avec clarté et sobriété par Micko Franck.

Emmanuel Pahud ©Warner Classics

Changement total d’ambiance avec le concerto pour flûte d’Eliott Carter, dont la musique tranchante et atonale, à la clarté foudroyante, forme un contraste saisissant avec l’œuvre de son aîné, dont il fut l’élève à l’université d’Harvard. La partie soliste est interprétée avec virtuosité et fougue par Emmanuel Pahud, qui a créé l’œuvre lors de sa première représentation en 2007. 

Pour clore cette première partie de concert, c’est vers une œuvre du maître adoré de Nadia Boulanger, Gabriel Fauré, que se tourne le programme, avec la délicieuse Fantaisie pour flûte et orchestre. Cette pièce de concours écrite pour flûte et piano, ici jouée dans la version orchestrée par son élève Louis Aubert en 1957, est une œuvre virtuose mais qui n’oublie pas d’être poétique.

Après l’entracte, deux musiciens de l’orchestre, le violoncelliste Renaud Guieu et la pianiste Catherine Cournot donnent une performance sensible et expressive des Trois pièces pour violoncelle et piano (1914) de Nadia Boulanger, trois petits joyaux tour à tour mélancoliques, exaltés et fougueux, dont l’écriture n’est pas sans rappeler la musique de Fauré.

Mikko Franck et l’Orchestre Philharmonique de Radio France ©Radio France-Christophe Abramowitz

Enfin la Symphonie pour orgue (1924) d’Aaron Copland (1900-1990) vient conclure ce programme très bigarré. Cette symphonie composée à la demande de Boulanger pour une tournée aux Etats-Unis lança la carrière du jeune Copland, et, comme l’explique le programme de salle, fut un moment fondateur de la musique américaine, inspirant des générations de compositeur américains comme Virgil Thomson, Roger Sessions ou David Diamond. L’organiste Lucie Dollat, admirablement accompagnée par Micko Franck et les musiciens de l’Orchestre Philharmonique de Radio France, a donné une interprétation d’une grande virtuosité et expressivité de cette oeuvre complexe et ardue, qui est marquée par l’influence du jazz, de la musique européenne et de Stravinsky.

Avec ce premier concert, Micko Franck et l’orchestre Philharmonique de Radio ont ouvert aux spectateurs de la Maison de la Radio une fenêtre sur l’univers fécond de Nadia Boulanger et leur ont donné l’opportunité de découvrir un programme unique de raretés musicales. En France, nous connaissons trop peu les compositeurs américains, alors même qu’un si grand nombre d’entre eux ont trouvé leur voix grâce à l’enseignement rigoureux et bienveillant d’une immense musicienne française.

Le cycle de concerts consacré à Nadia Boulanger et ses amis continue jusqu’au 29 janvier 2023. Informations

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