AccueilA la UneProfession de foi au Met Opera de New York

Profession de foi au Met Opera de New York

CONCERT – Le chef d’oeuvre de Francis Poulenc est à l’affiche du Metropolitan Opera House de New York cette semaine, dans une production XXL.

Lorsque John Dexter s’attela à la mise en scène des Dialogues des carmélites, une production dont la première fut jouée au Met en 1977, il dut s’accommoder des finances alors peu favorables de l’opéra New Yorkais. Peut être ces ressources limitées laissèrent-elles plus de liberté à la créativité du metteur en scène; toujours est-il que cette production devait rester comme l’une des plus acclamées de l’histoire du Met Opera, tant par la critique, que par le public.  

On ne badine pas avec la mort…

Pour cette saison 2022-2023, le Met renouvelle sa profession de foi et nous offre une scénographie (David Reppa) et des costumes (Jane Greenwood) sobres et épurés qui subliment la puissance mystique que Poulenc insuffla à son opéra. Le livret s’inspire de faits réels: pendant la terreur, seize nonnes du carmel de Compiegnes furent condamnées à mort puis guillotinées par les révolutionnaires. L’opéra retrace, sous la baguette magistrale de Bertrand de Bailly, le parcours de Blanche de la Force (Aylin Perez), une aristocrate qui ayant pris l’habit, mène sa vie de carmelite aux côtés de ses sœurs, et notamment la badine et clairvoyante sœur Constance (Sabine Devieilhe), la mourante et charnelle prieure Croissy (Alice Coote), la sévère prieure Lidoine (Christine Goerke) et l’aimante mère Marie (Jamie Baron), vite interrompue par les événements qui les conduiront toutes à l’échafaud.

 

La scène d’ouverture est saisissante. Les nonnes sont allongées sur une croix inclinée qui suggère une nef de cathédrale, tant l’ingénieux effet d’optique du scénographe parvient à nous convaincre de sa profondeur. Les sœurs sont étendues les bras en croix, dans une posture qui préfigure le martyre qu’elles vont endurer. Les décors s’en tiennent a des effets aussi sobres qu’élégants, qui soulignent, sans en distraire, l’austérité de la règle à laquelle sont tenues nos héroïnes.  

Dialogue de sorts

Poulenc nous livre dans cet opéra l’une des partitions les plus abouties de son œuvre. On y retrouve cette écriture romantique d’après-guerre, qui le distingue entre tous, faite d’un enchaînement libre de couleurs harmoniques aux inflexions modales. Cette étoffe orchestrale aux teintes subtilement atonales sous-tend une ligne vocale souple et lyrique, mais résolument récitative. Car chez Poulenc, la musique est au service du texte et l’inflexion mélodique souligne toujours la prosodie. Malgré la remarquable qualité de leur performances, on peut regretter que les solistes aient parfois négligé le soin que le compositeur voulait que l’on porte à la compréhension du livret, à l’exception notable de Sabine Devieilhe (sœur Constance), son timbre opalin –à la fois clair et velouté– et sa technique vocale éblouissante.

L’Acte III se conclut par un poignant Salve Regina qu’entonnent les nonnes rassemblées au pied de l’échafaud. Le chœur qu’elles forment s’éteint peu à peu alors que l’une puis l’autre marche vers la mort, le sourd et régulier retentissement de la lame les faisant à peine tressaillir.  

“Je tremble, mais c’est de froid” eut dit Jean Sylvain Bailly un instant avant son exécution par le Tribunal révolutionnaire. Poulenc aurait pu imaginer semblable épitaphe pour ses carmélites martyres. Ainsi, leur courageuse et paisible résolution face à la mort –malgré le chagrin de se dire adieu–, sut évoquer, même chez les plus impies d’entre nous, l’intensité mystique du salut éternel.

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