AccueilA la UneThésée de Lully par Les Talens lyriques : si Versailles m'était conté

Thésée de Lully par Les Talens lyriques : si Versailles m’était conté

COMPTE-RENDU – Un opéra de Lully par les Talens lyriques, c’est la garantie d’une téléportation imaginaire immédiate à la cour de Louis XIV, tant cet ensemble interprète la musique baroque française, et particulièrement celle de Lully, comme il respire. La preuve encore, jeudi 23 mars au Théâtre des Champs-Élysées, avec l’opéra Thésée.

La parabole des Talens

Les Talens Lyriques* ont un peu plus de trente ans et sont toujours dirigés par leur fondateur, le claveciniste Christophe Rousset. Jouant sur instruments d’époque, ils s’attachent à servir le répertoire lyrique avec basse continue, autrement dit nécessitant la présence continue d’un clavecin (ou d’un petit orgue portatif) jouant les harmonies et d’un violoncelle ou d’une viole de gambe jouant les basses. Plusieurs figures tutélaires se dégagent de ce répertoire : Monteverdi pour les Italiens, Haendel pour les Allemands et Lully pour les Français.

Compositeur attitré de Louis XIV pour sa musique de divertissement, Lully a composé treize opéras dont le troisième, Thésée, est sans doute un des plus équilibrés : livret bien écrit, par son compère Quinault (l’attelage solide entre un compositeur et son librettiste est souvent la preuve d’un opéra réussi), allure des grands chœurs, récitatifs élégants, beaux intermèdes dansés, protagonistes bien définis musicalement… Même s’il est un tantinet longuet -un prologue, cinq actes et beaucoup de répétitions musicales-, on en suit l’histoire avec intérêt.

Les hommes viennent de Mars, les femmes de Vénus

Thésée pourrait revendiquer l’assertion : si les hommes viennent de Mars, les femmes viennent de Vénus, tant la dualité, frôlant la caricature, y est clairement posée. Aux hommes les exploits sur le champ de bataille, aux femmes les prières pour la paix… Aux hommes les sonneries de trompettes et les roulements de tambour, aux femmes la douceur des flûtes… Ce qui permet à Lully d’encenser son cher Louis XIV. Ainsi, dans le prologue, peut on voir les Amours, les Grâces, les Plaisirs et les Jeux, représentations des plaisirs de la Cour, quitter à regret le château de Versailles, que le Roi délaisse pour se consacrer à la guerre contre les Provinces-Unies hollandaises. Quant au final, Le chœur des divinités dans le ciel, le peuple d’Athènes dans le palais et les acteurs de la tragédie chantent le bonheur de vivre dans une cité pacifiée, entendez la France, sous un règne si glorieux…


Entre les deux, ce côté « moi Tarzan, toi Jane » s’estompe un peu, l’amour et ses jeux venant troubler les cœurs et l’ordre établi. Heureusement, tout est bien qui finit bien : le Roi Égée découvre que le valeureux guerrier qui a mené ses troupes à la victoire, Thésée, n’est autre que son fils et l’intrigante et malfaisante Médée ne peut empêcher l’amour sincère qui unit ce dernier à la belle Aeglé.

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Un naturel déconcertant

La qualité des interprètes du soir fait sans doute qu’on suit avec agrément le déroulé de cette intrigue sans surprise. On peut même parler ici de naturel : naturel des musiciens à faire chanter cette musique, sur des instruments parfois difficiles à maîtriser, comme les trompettes naturelles, naturel du phrasé et de l’articulation musicale, savamment conduits par Christophe Rousset, naturel de la dictions des solistes et du chœur, qui manient la langue de Molière, pardon de Quinault, comme s’ils étaient nés dedans. Le tout est précis, simple et joyeux à la fois, et le plateau vocal de qualité supérieure : Karine Deshayes, dont on connait le grand métier, incarne Médée avec un sens du drame bien dosé, allié à une savoureuse auto-dérision. Le Thésée de Mathias Vidal est présent, tout en étant fin et subtil.

Le reste du plateau est au diapason, à l’aise dans son rôle, tant vocalement que scéniquement (Deborah Cachet/Aeglé, Marie Lys/Cléone, Bénédicte Tauran/Minerve, Thaïs Raï-Westphal/Dorine, Robert Getchell/Bacchus, Fabien Hyon/Un plaisir, Philippe Estèphe/Egée, Guilhem Worms/Arcas).

Avec peut-être une mention spéciale pour la soprano Thaïs Raï-Wesphal, dont la présence scénique n’a d’égal que la qualité de sa diction, la beauté de son timbre et l’aisance de ses ornements. Une dernière mention, enfin, pour le Chœur de chambre de Namur, qui, lui aussi, fait montre d’une belle précision musicale, doublée d’une incarnation du moment.

*L’ensemble Les Talens Lyriques tient son nom du sous-titre de l’opéra de Rameau, Les Fêtes d’Hébé (1739)

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