AccueilA la UneElles Disent, à la Villette : on en reparlera !

Elles Disent, à la Villette : on en reparlera !

DANSE – À la Grande Halle de la Villette, la compagnie Nach Van Van Dance Company a inventé un ovni de la danse contemporaine, sur le fil du rasoir, mené par l’extra-terrestre Nach. Ratage complètement barré ou expérience unique ? A vous de choisir ! 

Un spectacle de Krump ou pas ?

Tout d’abord, on m’avait vendu ce spectacle comme un spectacle de Krump, cette danse urbaine née dans les années 2000 dans les quartiers pauvres de Los Angeles et magnifiée par le film Rize de David LaChapelle en 2005. Il faut dire que chez les bobos parisiens, le Krump est devenu hype depuis quelques années, jusqu’à envahir la scène de l’Opéra Bastille en 2019, quand Clément Cogitore modernisa la fameuse Danse du grand calumet de la paix des Indes Galantes comme une « battle » de krump entre gang et corps de ballet. Une grande réussite qui restera dans les annales de l’Opéra. Elles disent est loin d’être seulement un spectacle de Krump classique avec des battles, mais plus un ovni de la danse contemporaine complètement inclassable, que certains pourraient qualifier de ratage complètement barré et d’autres d’expérience unique.

 

Mais qui est cette chorégraphe Nach ?

A l’origine de ce projet, il y a avant tout la performeuse, artiste, danseuse, krumpeuse et surtout chercheuse Anne-Marie Van alias Nach. Elle avait déjà mis en scène deux premiers solos Cellule et Beloved Shadows en ouvrant sa pratique du Krump à ce qu’elle appelle « l’esthétisme du récit et de la transcendance ». Son solo Cellule s’inspirait notamment de son séjour au Japon et était un mélange de danse butô, de théâtre de Nô et de Bunraku. Pour résumé, en alliant le Krump et les paroles, Nach célèbre la libération du corps dans ce qu’il y a de plus doux mais aussi de plus violent.

Nach © DR
Une première pièce de groupe pour cette création

Avec ce spectacle, Elles disent, c’est la première fois qu’elle crée une pièce de groupe avec trois autres danseuses d’univers totalement différents : Adélaïde Desseauve (dite Mulunesh), une autre krumpeuse et performeuse, Manon Falgoux, une danseuse chorégraphe et Sophie Palmer, une danseuse de flamenco et agricultrice. Elles sont toutes incroyables et se donnent corps et âmes dans ce spectacle sans aucune pudeur. Et rien que pour ça, bravo à elles. 

Mais d’où provient l’inspiration de cette création ?

Le titre de cette pièce Elles disent provient de cette citation de Monique Wittig “Elles disent qu’elles ont appris à compter sur leurs propres forces”, tirée de son ouvrage Les Guérillères (1969). Étrange féminin de guerrillos, ces guérillères combattent non pas l’homme en tant que tel mais plutôt leur oppression par les mots reçus des hommes. Elles veulent s’épanouir dans un monde nouveau, où leurs corps pourront retrouver leur indépendance. Le synopsis dans l’ère du temps exulte le féminisme et la sororité. Mais la grande question est : comment faire passer ce message par le corps ? 

Elles disent qu’elles ont appris à compter sur leurs propres forces

Monique Wittig
« Elles disent » – Nach © Romain Tissot
Mais qu’est-ce qu’on voit en fait sur scène ? 

Sur une scène nuen sans artifice ni décor, quatre femmes habillées comme dans la vie de tous les jours, en mode détente, vont à tour de rôle libérer leur corps et leurs paroles, ponctuées d’onomatopées. Chacune exulte sa spécificité, car chacune est unique. Leurs voix se chevauchent et leurs récits demeurent incompréhensibles malgré l’amplification des micros permettant de faire sortir certains mots et certaines phrases du lot comme « I don’t give a fuck ». La situation semble grave mais elles ont du mal à l’exprimer d’autant plus quand elles sont seules. Ainsi nous passons de solos, à duos, puis quatuors. Quatre corps distincts dans leurs spécificités au début qui n’en forme plus qu’un à la fin. L’apogée finale est une scène orgasmique à quatre voix dont le spectateur se sent complètement exclu, comme si son regard importait peu. Or, ne plus avoir peur du regard des autres donne accès à une libération du corps, quasi animale, et marque souvent le début du chemin vers le bonheur, ce que semblent bien avoir compris ces danseuses, en cassant toutes frontières. 

Alors, verdict ?

L’expérience est puissante et unique, flirtant entre une performance artistique du Palais de Tokyo et une soirée Very Bad Trip sous drogue, avec un total lâcher prise qui pourrait être salutaire à certains après une grosse journée de boulot. Les novices de la danse contemporaine et les accros au ballet classique trouveront cette création complètement barrée et ratée sans aucun doute. Et pourtant, même si ce spectacle mériterait un cadre un peu mieux défini, Nach a réussi son coup : aucun spectateur n’oubliera ce qu’il vient de voir ce soir et en parlera autour de lui.  

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