AccueilA la UneToulouse : le tour du monde en trois chefs-d'œuvre

Toulouse : le tour du monde en trois chefs-d’œuvre

CONCERT – L’Orchestre National du Capitole de Toulouse dirigé par Aziz Shokhakimov présente à la Halle aux Grains un concert dédié à la musique romantique, abordant diverses influences traditionnelles de l’Europe et de l’Amérique du Nord. Le concert met également à l’honneur la violoniste Manon Galy dans le troisième concerto pour violon de Saint-Saëns. Petit tour de la musique occidentale en trois chefs d’œuvres. 

Allemagne : Brahms et les chères études

 Ecrite pour l’université de Breslau où elle fut créée (ville encore Prussienne à l’époque), l’Ouverture pour une fête académique de Johannes Brahms puise ses inspirations autant dans le classicisme allemand que dans les chants étudiants, que le compositeur connaissait tous deux sur le bout des doigts. Trouvant dans l’exécution le juste équilibre entre netteté et fluidité, le rendu de l’orchestre fait mouche. Le talent des solistes est remarqué dans les parties de bois. Aziz Shokhakimov montre ses qualités d’interprète du répertoire allemand qu’il dirige régulièrement sur ses terres. Engagé corporellement dans sa gestuelle, il communique son inépuisable énergie aux musiciens. Les multiples nuances que comportent la partition sont développées avec précision tout en maintenant l’harmonie la plus parfaite, y compris dans le brillant forte final. 

Aziz Shokhakimov lui non plus n’est pas loin de ses chères études… ©Nicolas Roses
France : l’esprit de chapelle de Saint-Saëns et Massenet

C’est à Manon Galy (récompensée entre autres aux Victoires de la musique en 2022) que revient le privilège d’interpréter la partie soliste du troisième concerto pour violon de Saint-Saëns. Toulousaine de naissance, elle fut formée dans le conservatoire de la ville et assista à ses premiers concerts symphoniques à la Halle aux Grains. Elle confie d’ailleurs, dans un entretien à La Dépêche, son émotion particulière de jouer ce soir dans cette même salle. Vêtue d’une longue robe argent à fines bretelles, brillant de mille éclats et coiffée d’une longue queue de cheval, elle entre dans la salle. Sans pupitre et sans partition, elle interprète par cœur l’intégralité du virtuose concerto. Tout à fait dans l’esprit de ce que désirait Saint-Saëns, le jeu est démonstratif et l’exécution pleine de verve mais ne verse jamais dans les excès ou les crissements intempestifs : elle sert toujours profondément la musique. Les longues notes irrésistiblement tenues du premier et troisième mouvement percent délicieusement le cœur. Le paradoxe est saisissant entre la légèreté de la musique et la profondeur des émotions générées.

Manon Galy ©Caroline Doutre

Cette sensibilité est également exacerbée dans les dialogues languissants du deuxième mouvement entre le violon solo et l’orchestre. Les relations entre ces deux acteurs sont d’ailleurs très bien menées tout du long. La richesse des sonorités de l’orchestre forme l’alliage parfait avec la complexité de celles du violon. La synchronisation entre les parties solistes et orchestrées est des plus naturelles. On n’entend ainsi ni anticipation, ni latence. L’oreille attentive d’Aziz Shokahkimov balance judicieusement les puissances volumiques de chaque groupe et du soliste permettant le fonctionnement harmonieux de l’ensemble. Les atouts intrinsèques de l’orchestre comptent aussi parmi les clefs du succès de ce concerto, notamment sa précision et sa coordination dans les attaques, l’intensité colorée de ses cuivres ou encore les motifs de bois du deuxième mouvement rappelant la symphonie pastorale. 

La méditation de Thaïs, extraite de l’opéra éponyme de Jules Massenet est donnée en rappel avec l’orchestre. L’intelligence musicale du phrasé de Manon Galy est une nouvelle fois indéniable, conférant à chaque note une portée émotionnelle bouleversante. Sur la note finale de violon de l’opéra, Thaïs affirme « Je vois Dieu ». Le public toulousain ne l’a peut-être pas vu ce soir, mais il ressort tout de même de ce concerto avec la forte impression d’en avoir entendu au moins un écho.

La fougue de Manuel de Falla nous a révélé celle de Manon Galy en 2022
Amérique : Dvorak en Erasmus

C’est à un compositeur tchèque que l’Amérique commanda une symphonie devant refléter son image. Si la Symphonie du Nouveau Monde a atteint une telle postérité c’est certainement parce qu’en plus de l’indéniable qualité de sa composition, Antonin Dvorak a efficacement atteint cet objectif. Symphonie tout en contrastes comme l’est l’Amérique. L’orchestre demeure bien coordonné. Aziz Shokhakimov fait alterner douceur et éclat. On s’imagine ainsi très bien en écoutant son interprétation, l’effervescence new yorkaise servie par les rythmes vifs et une large orchestration dans le premier mouvement mise en regard des immensités sauvages (du Montana par exemple). Dessinant une nature apaisante mais brute, celles-ci sont symbolisées dans le deuxième mouvement par la paisibilité des cordes frottées associée aux motifs de bassons et de cor anglais. A certains moments se retrouve l’inspiration de mélodies amérindiennes qui peuplent probablement ces environs. C’est aussi une musique épique que propose cette symphonie dans le quatrième mouvement, avec ses appels de cors, ses ostinatos de cordes (où l’on peut admirer le coup d’archet de l’orchestre du Capitole) et ses timbales franches. On y entrevoit l’élan de la conquête des pionniers. Cette Amérique, belle, vaste et puissante est finalement résumée dans le crescendo clôturant la symphonie et pour lequel l’orchestre du Capitole aura conservé toutes ses réserves avant les derniers accords finaux.

À lire également : Menu gastronomique au Capitole de Toulouse 

Entrainé par un chef engagé et un orchestre au sommet de sa forme, le public toulousain bénéficie d’un bon aperçu du romantisme musical européen au crépuscule du XIXème siècle. Embrassé par deux monuments symphoniques en guise d’écrin, la star de la soirée demeure le troisième concerto pour violon de Camille Saint-Saëns et son interprétation emplie de sensibilité artistique comme émotionnelle par Manon Galy. Le public reconnaissant applaudit tout au long de la soirée et même à la fin, jusqu’au départ des musiciens après les nombreuses levées des différents pupitres comme de l’ensemble. 

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2 Commentaires

  1. BEL ARTICLE !
    Nous avons eu la chance d’assister à ce très beau concert.
    Merci à l’orchestre du Capitole, son jeune Chef et particulièrement à la merveilleuse Manon Galy !
    Quel régal…quelle émotion !!!
    BRAVO

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