AccueilA la UneMozart et Bruckner à Radio France : symétrie parfaite !

Mozart et Bruckner à Radio France : symétrie parfaite !

Nous sommes à l’Auditorium de Radio France, il est bientôt 20h. Le programme de ce 26 mai est clair et efficace : un concerto, une symphonie. Mozart, Bruckner. Un soliste, un orchestre. Trois mouvements pour le premier morceau, puis quat… attendez quoi ? Seulement trois mouvements pour la 9e de Bruckner ? Chef, il y a une erreur dans le programme ! 

3+3 = … ?

Évidemment, les pièces n’étaient pas lacunaires. Enfin, si, mais c’est normal. Si le Concerto pour Piano et orchestre n°23 en la majeur (K 488) de Mozart est de facture conventionnelle, la Symphonie n°9 de Bruckner, elle, est amputée de son dernier mouvement – laissé inachevé par le compositeur. Et puis, me direz-vous, trois mouvements pour une symphonie, ça se fait. Oui ! Mais la soirée en devenait étonnamment symétrique et proportionnée : aux trois mouvements du concerto (vif-lent-vif) répondaient trois autres mouvements (solennel-mouvementé-solennel), avec une œuvre introductive pile moitié moins longue que la seconde. Le tout sous la baguette d’un chef méticuleux et implacable : Marek Janowski. Un authentique moment de plaisir esthétique !

LE Maestro : Marek Janowski ©DR
Mise en bouche mozartienne 

Comment parler de Mozart et de ses concerto sans les prendre pour de petits chef d’oeuvres de gourmandise ? En entendant l’introduction de l’orchestre, nous nous sommes sérieusement demandé comment le piano pourrait dès son entrée se montrer encore plus délicat et tendre. Le soliste Mao Fujita y parvint sans difficulté aucune : il fut plus léger que la légèreté elle-même, gracieux, et tonique quand il le fallait. Il n’y en avait cependant pas que pour le piano dans cette pièce ; on put apprécier les interventions des clarinettes et des bassons (prêtez attention aux redoutables notes détachées du troisième mouvement !). Les attaques aux cordes étaient – et ce tout au long du concert – d’une netteté extrême, et les pizz infiniment malicieux. Mention spéciale pour le mouvement lent, le 2e, dont l’élégance nous a coupé le souffle – qui fut cependant aussi le moment de quelques accidents à la flûte.

À lire également : Mozart Momentum, l'instant piano
Vous savez combien ça fait 60 minutes déjà ? 

Nous l’avons dit, c’est une chose étrange qu’une symphonie en trois mouvements, quand l’oreille s’habitue à un chiffre pair. Mais force est de constater que si certaines (longues) symphonies finissent parfois par perdre leur public – tout comme le roman peut parfois laisser son lecteur divaguer – la 9e de Bruckner, elle, nous tient en haleine et ne nous laisse aucun répit. Il y a bien sûr, déjà, l’incroyable densité de l’écriture. Puis la masse monumentale de l’orchestre et de son armada de cuivres. Marek Janowski dirigeait l’Orchestre Philharmonique de Radio France d’une main de fer, et l’intensité du discours musical fut rendue à la perfection. La 9e de Bruckner est une pièce qui dès les premières notes se revendique infiniment dramatique – quand bien même elle ne prétend avoir aucun contenu narratif.

C’est le déploiement d’une recherche formelle de la beauté, une exploration de la tension tragique sans souci de renvoyer à des images. Si le premier mouvement était déjà très intéressant dans la manière qu’il avait de trancher avec Mozart, dans l’introduction aussi de contrastes lumineux, ce fut le deuxième qui, là encore, sut nous séduire le plus : il y avait ce coup de théâtre initial, ces jeux de question / réponse entre vents et orchestre, et puis, ce thème, entêtant, obstiné, monocorde, et génial. Le troisième mouvement (et dernier, si vous nous avez suivi) est encore plus difficile à résumer ; il se compose de moments de quasi-immobilité qui vont s’étirer peu à peu, toujours avec prudence et minutie, dans une sorte de majesté contenue, que la note finale, tenue par les cors, paracheva avec brio. Après une pièce aussi poignante, il est sans doute difficile de laisser libre cours à la simple effusion. Marek Janowski, irréprochable tout au long du concert, fut splendide de sobriété lors des applaudissements. 

Alors non, au sens strict, le compte n’était pas bon. Mais on s’en contentera. Car avec ces trois mouvements, Bruckner avait déjà tout dit.

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