AccueilA la UneL'Allemagne à Toulouse : d'Airbus au Capitole !

L’Allemagne à Toulouse : d’Airbus au Capitole !

COMPTE-RENDU : L’Orchestre National du Capitole de Toulouse sous la direction de Cornelius Meister présente un concert largement dédié au romantisme allemand (Schumann, Brahms) et mettant à l’honneur le pianiste David Fray. 

Les plans de l’avion par les ingénieurs Campo, Schumann et Brahms

Ah Toulouse ! S’il y a bien deux choses pour lesquelles la ville est connue c’est pour son industrie aéronautique et la qualité de ses musiciens. Deux domaines dans lesquels la France et l’Allemagne s’illustrent particulièrement quand elles travaillent ensemble. On a donc assemblé pour ce concert les plans dessinés sur du papier à musique par le compositeur contemporain français Régis Campo et les compositeurs romantiques allemands Robert Schumann et Johannes Brahms. De l’œuvre du premier, Art Spirit on retient les formes régulières et équilibrées ainsi que son design souvent inspiré de la musique de film faisant écho à l’univers de la science-fiction donnant à notre avion des airs d’USS Entreprise ou de Faucon Millenium.

Cornelius Meister, un habitué du Capitole

L’œuvre s’ouvre sur un lent thème régulier de cordes frottées et percussions auquel s’ajoute progressivement d’autres instruments travaillant en groupes rythmiques fonctionnels distincts, qui évoluent et se transforment tout au long de la partition, conférant à l’auditeur une impression de cinétique qui pourrait très bien rappeler les engrenages et mécanismes entrainant le moteur d’un avion. Composé spécialement pour Cornelius Meister, Art Spirit devait initialement être présenté au Staatsoper Stuttgart (dont il assure la direction musicale) mais la création fut différée jusqu’à aujourd’hui à cause des restrictions sanitaires.

On aura choisi pour la carlingue de notre avion la deuxième symphonie de Brahms en raison de la qualité de sa construction autour d’une cellule génératrice de ré, do dièse, ré. Ainsi l’on constate la solidité du matériau, éprouvée par l’histoire de la musique d’où elle tire ses composants. La fantaisie du concerto pour piano en la mineur de Schumann convient parfaitement pour les ornements de notre avion lui conférant un luxe intérieur digne des plus prestigieuses compagnies aériennes. Maintenant que notre avion est bien conçu, il faut lui trouver deux bons pilotes pour l’amener à bon port !

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Cornelius Meister et David Fray : un pilotage soigné.

L’avion n’est pas rempli et le succès commercial de ce concert a été somme toute relatif, les sièges occupés de certaines catégories étant pour le moins clairsemés. Le commandant de bord Cornelius Meister arrive, dans un ensemble quelque peu fantaisiste et délicieusement anachronique, lui donnant l’air d’un dandy du siècle dernier. Le voyage commence avec Art Spirit. La précision de la direction de Cornelius Meister et la tenue exigeante des tempi permet le fonctionnement bien huilé de notre machine. Les motifs rythmiques parallèles et distincts écrits par le compositeur sont ainsi déroulés tout en gardant une cohérence d’ensemble. En regardant au travers du hublot, on peut admirer les textures sonores produites par l’orchestre tantôt lisses et brillantes telles un nuage ensoleillé tantôt plus métalliques ou délicatement côtelées dans les ostinatos. La nature est aussi imagée. Par exemple quand un motif de cordes pizzicato, piano et percussion vient troubler le ciel calme par une évocation de la pluie. La partition se prêtant peu aux contrastes, les réacteurs de notre appareil conservent leur vitesse de croisière jusqu’à l’atterrissage tout en douceur lors du decrescendo final.

Le tardais David Fray ©Jean-Baptiste Millot
Schumann : chacun sa route…

Les mêmes qualités sonores de l’orchestre sont retrouvées dans le concerto pour piano de Schumann. La netteté des attaques est appréciée. Lors du premier mouvement les deux pilotes, bien que chacun excellent dans leur partie, peinent un peu à se mettre d’accord sur une même trajectoire. Le piano soliste est ainsi parfois couvert par l’orchestre et de très légers décalages rythmiques entre les deux peuvent se faire entendre. Le pianiste tarbais David Fray, aujourd’hui de renommée internationale, joue sans partition. Le jeu est élégant voire timide durant le premier mouvement mais il s’anime et s’intensifie dès le deuxième et jusqu’à la fin finissant même très énergiquement. L’expressivité du piano dans les derniers mouvements, bien que désinhibée évite les amplifications ou emphases excessives. Cela concorde également avec une amélioration de la synergie avec l’orchestre qui ne posera plus aucun problème après l’amorce du deuxième mouvement.

Brahms en pilote automatique

Troisième et dernier voyage, la deuxième symphonie de Brahms révèle la richesse du romantisme allemand malgré sa construction autour d’un motif simple. La direction contemplative de Cornelius Meister laisse une bonne place aux couleurs de l’orchestre notamment à ses cordes envoutantes. Sans effets superflus, des atmosphères se dégagent par exemple une certaine obscurité avec les violoncelles du deuxième mouvement. L’unité est préservée dans les nuances et les volumes adaptés. La direction sobre mais claire permet à l’orchestre une interprétation sensible, précise et subtile rendant grâce à la musique de Brahms. Ce rendu est probablement le fruit d’un long travail de répétition, finement réglé par l’oreille implacable du chef. Le final brille d’une intensité particulière, tout à fait en phase avec la majesté de cette deuxième symphonie de Brahms. 

Le dernier mouvement de la Symphonie n°2 en Ré majeur de Brahms

L’interprétation franco-allemande d’un programme franco-allemand montre, à Toulouse, que les musiciens comme les ingénieurs de nos deux pays travaillent souvent ensemble pour le meilleur. L’équipage aux petits soins de la musique, mêle sous le pilotage serein de Cornelius Meister, le travail collectif de l’orchestre à l’expression de chaque instrument et en particulier du piano de la fierté locale David Fray. C’est cela qui fait le succès de ce concert qui n’aura connu quasiment aucune turbulence. Les applaudissements sont nourris pour l’ensemble des interprètes ainsi que pour le compositeur Régis Campo.

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