AccueilÀ l'écranConcert Lalo Schifrin à Radio France, Mission : Accomplie !

Concert Lalo Schifrin à Radio France, Mission : Accomplie !

CONCERT – Il n’y avait pas eu de grand concert de sa musique à Paris depuis une mémorable soirée en 2007 au Grand Rex dirigée par le Maestro en personne : Radio France vient de corriger ce manque avec un concert qui fera date, donné à l’Auditorium de la Maison de la Radio le 3 février. Stéphane Lerouge avait concocté pour l’occasion un programme idéal permettant de naviguer entre la carrière cinématographique de Schifrin et ses musiques de concert. 

Le concert est à retrouver en intégralité sur Arte Concert

Qui est vraiment Lalo Schifrin ?

Il est de ces compositeurs dont la musique se résume trop souvent à un immense succès, sorte d’arbre cachant une forêt remplie de trésors. C’est le cas de Lalo Schifrin dont tout le monde connait le fameux thème de la série « Mission : Impossible », mais dont on a parfois tendance à oublier l’incroyable richesse d’un répertoire mêlant jazz, musiques latino-américaine et symphonique. Né à Buenos Aires en 1932, formé d’abord au piano par Ernesto Barenboïm (le père de Daniel), grand amateur de jazz (adolescent, dans l’Argentine de Perón, il achetait sous le manteau les albums de Thelonious Monk et Charlie Parker) puis formé à Paris dans les classes d’Olivier Messiaen et Charles Koechlin, Lalo Schifrin saura digérer toutes ces influences pour les synthétiser en une œuvre unique, un modèle de mélanges des genres.

Ami et arrangeur de Dizzy Gillespie, il sera très vite repéré à Hollywood. Il va signer ainsi des bandes originales aussi mémorables que celles de Bullit, Mannix, l’Inspecteur Harry, Luke la main froide et tant d’autres… Le langage plus jazz, funk de Schifrin correspondra à l’arrivée d’une nouvelle ère de compositeurs de musique de films à Hollywood (parmi lesquels Quincy Jones, Henry Mancini…) qui vont enterrer, malgré eux, les grands compositeurs « symphonistes » de l’âge d’or. Mais Lalo Schifrin n’oubliera jamais sa formation classique, particulièrement dans ses arrangements réalisés pour le concert. 

Lalo Schifrin
Les copains d’abord

Côté interprètes, Radio France a eu l’excellente idée d’inviter des compagnons de longue date de Lalo Schifrin : Jean-Michel Bernard d’abord, un de ses proches amis, formidable pianiste et également compositeur de musiques de film, qui signa d’ailleurs il y a quelques années un sublime album avec Schifrin (ce dernier lui a même écrit une sonate dont on attend avec impatience la création), l’excellent bassiste Pierre Boussaguet, grand habitué de ce répertoire et le batteur François Laizeau. Ils sont accompagnés par Sylvain Gontard (trompette), Denis Leloup (trombone) , Mathilde Calderini (flûte solo du Philharmonique de Radio France) et le bandonéoniste Juanjo Mosalini. Cette équipe de choc est complétée magnifiquement par un orchestre philharmonique de Radio France des grands soirs dirigé par un Victor Jacob totalement à l’aise dans ce répertoire contrasté. 

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De Bruce Lee à Clint Eastwood

Jean Michel Bernard ouvre le bal avec le thème de Mannix au piano : tout Lalo Schifrin est déjà là, la mélodie idéale, les rythmiques syncopées, le jazz mais aussi la forme classique : Jean-Michel Bernard connait décidément son Schifrin. L’orchestre prend immédiatement la suite dans l’arrangement symphonique du même Mannix : un déferlement de couleurs, d’influences mêlées avec génie sans que l’une ne prenne le dessus sur l’autre. Suivront la musique brutale qu’il signa pour le film de Bruce Lee Opération Dragon (dont on regrette un peu l’absence du cri mythique de la BO originale !), puis la musique des Félins de René Clément, sa première partition pour le cinéma : le duo Sylvain Gontard (trompette) / Denis Leloup (trombone) s’amuse visiblement dans ce pur moment jazz, soutenu par le trio Bernard-Boussaguet-Laizeau. La BO de the Fox, dont le thème sensuel est d’abord connu pour avoir été utilisé dans une publicité pour une célèbre marque de collants, fonctionne là aussi à merveille dans sa version pour orchestre. 

Une soirée de musique de film rare, émouvante, pétillante, comme on en voudrait plus souvent en France. 

La Suite symphonique de l’Inspecteur Harry « Dirty Harry » de Don Siegel (avec un Clint Eastwood dans le rôle du flic aux méthodes expéditives Harry Calahan), est magnifiquement arrangée là encore. Certes la version funk de la BO originale est insurpassable mais Schifrin est un orchestrateur génial qui sait tirer d’un orchestre des sonorités qui se rapprochent vraiment de la musique originale. Le philharmonique de Radio France se fait plaisir visiblement dans cette musique et le chef Victor Jacob sait éviter la rigidité de chefs peu habitués à ce répertoire et il a du swing à revendre. Le trio Bernard-Boussaguet-Laizeau est au sommet. 

« Go ahead, make my day »…

On est plus circonspect sur la création des huit élèves du la classe de musique à l’image du CNSM de Lyon, écrite en hommage à la musique de Mission : Impossible et qui termine la première partie du concert. On y entend quelques influence schifriniennes certes mais elles sont rares et la pièce, en forme de pot-pourri, s’étire un peu en longueur et va chercher des influences ailleurs que chez le grand Lalo. C’est bien orchestré mais l’architecture ne convainc pas totalement. 

L’affiche du Kid de Cincinati, de Norman Jewison

La deuxième partie du concert présente la musique du Kid de Cincinnati avec Steve McQueen, l’une de plus belles mélodies du compositeur argentin. Puis le rare Invisible City où Pierre Boussaguet fait chanter sa contrebasse comme personne. Les origines argentines de Lalo sont convoquées lors d’un Tango del Atardecer pur jus, qu’il composa pour le film Tango de Carlos Saura et auquel le bandonéon de Juanjo Mosalini lui donne sa couleur idéale

Des partitions originales

La suite du programme présente deux œuvres purement concertantes avec la création mondiale par Jean-Michel Bernard du 3ème mouvement d’une Jazz Sonata écrite au départ pour rien moins que Bill Evans, qui n’eu jamais le temps de la travailler. Virtuosité, construction complexe : là encore Schifrin étonne par l’étendue de son inspiration. Succès pour cet Everest pianistique. La douceur de la flute de Mathilde Calderini viendra ensuite charmer le public dans le rare Concierto Caribeno : la musicalité de la jeune flutiste est incroyable dans une pièce qui réclame pourtant de sortir certainement de sa zone de confort de musicienne de formation classique. Superbe !

Et évidemment, que serait un concert Lalo Schifrin sans Mission : Impossible qui déclenche l’hystérie du public grâce à un Philharmonique de Radio France galvanisé !

Mission : Impossible

Bis idéal : Bullit, qu’on peut considérer comme la plus parfaite B.O. de Schifrin, un chef d’œuvre de bout en bout qui s’écoute pour elle-même et Jean-Michel Bernard terminera ce concert comme il avait commencé, seul au piano, pour une version de Luke la Main Froide douce et subtile.

Une soirée de musique de film rare, émouvante, pétillante, comme on en voudrait plus souvent en France. 

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